La mobilité individuelle motorisée et la protection du climat
Dans le contexte de l’actuel débat sur le climat, la récente publication d’une analyse menée par l’Agence européenne pour l’environnement (AEE) sur les émissions de CO2 des voitures neuves mises sur le marché s’avère particulièrement bouleversante. Constat principal de l’étude : les émissions de CO2 des voitures neuves mises sur le marché en Europe ont augmenté en 2018, pour la deuxième année consécutive, et ce contrairement à toutes les attentes!
A côté des plans – déjà largement insuffisants – de l’UE pour réduire les émissions moyennes des parcs automobiles neufs des différents constructeurs d’ici 2021 jusqu’à 95 g. CO2/km, les récents chiffres publiés constituent un aveu d’impuissance face aux efforts qui sont entrepris pour augmenter la protection de l’environnement et du climat. Au vu de cette évolution, l’objectif déclaré de réduire, au-delàet comme prévu, lesvaleurs limites de CO2 de 37,5 % entre 2021 et 2030, semble pratiquement irréalisable.
Voitures neuves – des émissions en hausse plutôt qu’en baisse …
Toujours selon l’analyse de l’AEE, les émissions moyennes des voitures particulières neuves ont augmenté de 0,4 g CO2/km en 2017, cela après une baisse constante de près de 22 g CO2/km entre 2010 et 2016. Les données préliminaires indiquent clairement que la tendance à la hausse s’est poursuivie en 2018 avec une augmentation supplémentaire de 2,0 g CO2/km – malgré la fabrication de moteurs plus économes en énergie!
L’une des principales raisons de l’augmentation des émissions de CO2 est la vente croissante, depuis des années, de véhicules tout-terrain urbains, communément appelés « SUV ».
Dans toute l’Europe, des voitures de plus en plus lourdes déterminent le marché automobile. En 2017, la part des véhicules tout-terrain dans l’ensemble des voitures nouvellement achetées au Luxembourg était de 28%, ces SUV générant une puissance moyenne de 164 chevaux. Dans les pays voisins, cette même tendance se vérifie, avec un peu plus d’un tiers des nouvelles immatriculations (2). Face à un tel développement du marché automobile, même des motorisations de plus en plus efficientes n’ont pas pu empêcher la hausse des émissions de CO2, puisque le poids plus élevé et les pneus plus larges des SUV, tout comme leur mauvaise aérodynamique, sont toujours aussi synonymes de besoin accru en énergie, c’est-à-dire en carburant.
Face à cette tendance – néfaste pour le climat – vers les voitures toujours plus grandes,la prise en considération des émissions jusqu’ici non-recensées – en termes de production, de ressources requises et d’utilisation – s’imposera à l’avenir.
En effet, un dit «effet rebond» se créé, et ce malgré une motorisation plus efficiente … qui nécessite pourtant davantage de carburant au vu de la conception spécifique du SUV. Pour ce qui est précisément du SUV, « l’effet rebond » se résume par une utilisation accrue et plus négligente en raison de l’impression purement subjective de posséder une voiture apparemment plus respectueuse de l’environnement.
A côté du carburant, un véhicule tout-terrain urbain nécessite beaucoup plus de ressources et produit davantage d’émissions qu’on ne le croit. Ainsi, les pneus doivent supporter un plus grand poids, résister à des forces plus importantes en raison d’un centre de gravité plus élevé du véhicule, et sont donc sujets à une usure plus élevée. Ce qui produit plus d’abrasion, qui est la plus grande partie du micro-plastique qui finit dans nos eaux usées (3). Les pneus, les freins et l’abrasion provenant directement du revêtement routier produisent également des particules fines. Ces-dernières sont ainsi renforcées avec le boom des voitures lourdes (4).
Les voitures deviennent plus larges, contrairement aux rues …
Autre point à ne pas négliger : la surcharge de nos infrastructures! Fait est que ce ne sont pas les places de parking qui sont trop petites, mais plutôt les voitures – censées y stationner – qui sont trop grandes. Sur les aires de stationnement, cela se traduit par un besoin accru en surface … disponible pour un nombre réduit de voitures. Dans les zones urbaines, où cette « avalanche » de tôle prend les rues littéralement d’assaut, les SUV constituent de plus en plus des obstacles. Comme ces véhicules sont souvent plus larges que les bandes de stationnement existantes, il n’est pas rare de voir deux pneus stationnés sur le trottoir, évinçant ainsi sans pitié piétons, poussettes et personnes à mobilité réduite.
La sécurité avant tout : l’égoïsme « blindé » !
En cas d’accident, les piétons (surtout les enfants) et les automobilistes conduisant des voitures moins lourdes sont exposés à de plus grands dangers … ainsi qu’aux lois de la gravité. Cette relation inégale crée un sentiment d’insécurité, qui nourrit la course aux voitures « blindées » dans les rues – au détriment du climat, de l’environnement et de la sécurité en général.
Les SUV équipés de moteurs électriques et hybrides ne changent rien au problème cités. Les SUV électriques nécessitent des batteries d’autant plus lourdes, qui consomment nettement plus d’énergie, une relation pour le moins disproportionnée par rapport à la mobilité durable. Car là aussi, plus de deux tonnes doivent être déplacées sur la route … afin de transporter généralement une seule personne. Par conséquent, un amendement des avantages fiscaux et des primes (Clever fueren) s’impose de toute urgence !
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(1) https://www.eea.europa.eu/highlights/average-co2-emissions-from-new
(2) Reporter.lu « Ungebremst in die Klimakatastrophe » (Mai 2018)
(3) Studie « Kunststoffe in der Umwelt zu Mikro- und Makroplastik » Fraunhofer-Instituts für Umwelt, Sicherheit und Energietechnik
(4) Quelle: Umweltbundesamt